Florent Le Men
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Je me suis demandé ce qu’est réellement la poterie car je ne suis pas fasciné par elle.
Au départ, toute chose tombe. Depuis la formation de la Terre jusqu’à l’existence d’un ruisseau, tout a une histoire de gravitation. L’Homme aussi, mais c’est une histoire de bagarre, car il a faim et soif et il a peur que la faim et la soif le reprennent encore. Alors il se met à organiser le désordre, à rassembler l’éparpillé, à conserver ce qui, chaque jour, se cherche. C’est un vice que nous partageons avec le castor, le pélican, l’oiseau aussi, jaloux de ses œufs, et qui consiste à refuser que la gravité s’occupe unilatéralement de la répartition des choses sur terre. La poterie fétichise ce qu’elle contient parce qu’elle vole quelque chose à l’attraction terrestre et alors tout ce qui se conserve devient un bien. Ainsi, l’eau devient précieuse, c’est que nous ne la laissons pas couler. C’est comme ça, ce qui sort du chaos pour se répartir change de nature. Dans un barrage, l’eau devient énergie. Et dans le bol aussi. Voilà comment nous appauvrissons le monde sous le soleil. Faire advenir le précieux, n’est-ce pas appauvrir tout le reste ?
Et pourtant, tenez, il y a là une idée, un dessin, une image, un phantasme. Vous aimeriez le saisir mais cela file entre vos doigts et vous laisse pauvre car vous avez perdu votre mémoire dans ce bol qui contient vos richesses. Vous voyez ces choses qui n’existent que dans les circonvolutions de votre cortex ? Elles sont si bonnes et pourtant si fragiles ! Il y a certes pour elles ce lieu étrange, au dessus, où toute chose se répand comme le lierre et disparaît aussitôt. On l’appelle Internet, avec une majuscule et sans article, comme Dieu. Et, comme lui, ce monde d’idées est un rêve où tout se transforme sans cesse, tout s’évapore aussi pour laisser place à un autre délire, et ça ressemble à la nuit.
Il est aussi un monde en dessous, où les biens se conservent jalousement et se concentrent toujours plus, où ce qui est insignifiant s’accumule avec ferveur et nous savons pourquoi. Quelque chose a bogué dans la deuxième loi de la thermodynamique et le monde s’est séparé entre la nuit qui disperse ses enfants et le jour qui les met en rang.
Je voulais dessiner mais le papier me faisait peur, et on ne comprend pas bien cela. C’est que cette peur n’était pas la mienne mais celle de ma main et des traits qui se bousculent en elle. Mais oui, quel dessin voudrait se retrouver prisonnier d’un support si pauvre. Il vole, il brûle, mais surtout il se perd. Là, dans des cartons ou des tiroirs qu’on n’ouvre jamais. Alors le dessin refuse et nous envoie ce qui s’appelle l’angoisse (le papier est au dessin ce que la masturbation est aux gamètes) et vous croyez que cette peur vous appartient. C’est que les idées se servent de nous et non l’inverse et comme toute chose elles cherchent à se reproduire et à se conserver. Certaines sont ambitieuses et estiment que la télévision ou les panneaux publicitaires sauront mieux que tout autre support leur assurer la plus belle descendance. Se trompent-elles ? D’autres sont parasites et se fixent sur l’objet pour bénéficier de sa publicité. Voilà ce qu’est un décor. Certaines encore sont peut-être un peu idiotes qui germent dans l’esprit d’un potier et se prennent pour des pommes, des fleurs ou le contenu d’une poche. Elles débordent la surface d’un pot pour devenir son contenu. Voilà un support bien confortable. Alors, étrangement, la main n’hésite plus, le dessin n’a plus peur. Car il croit ainsi sortir de la foule des rêves qu’on oublie pour devenir un bien qui se sait à l’abri, aussi longtemps que peut vivre l’objet qui le contient.
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Ich male in schwarz-weiß auf Porzellan:
Motive auf Stücken, die zum Gebrauch bestimmt sind; und Geschichten auf denen, die keinen bestimmten Zweck erfüllen sollen.
Ich arbeite gern mit Porzellan und liebe es, daraus Sachen zu machen, die es vorher noch nicht gab.
Ich arbeite auch an Glasuren: vor allem traditionelle chinesische Glasuren wie Seladon und Ochsenblutglasuren.
Quellen meiner Inspiration sind: H. Darger, T. Matsumoto, die Natur, I. Sakabashira, R. Crumb, Stoffe, F. Coché, Mauern, D. Attenborough, G. Bosch…
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I am a drawer who cannot work without ceramic. Therefore I try to find this spirit, where drawing and material are linked together like in old Japanese Nabeshima or Kutani porcelain. My work is now based on a compulsive practice of colors and a systematic use of text. I am not looking for technical virtuosity but simply try to make beautiful things that make you think.
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